Quelles sont les origines de la porcelaine japonaise ?
L’histoire de la céramique de Hizen est en tout point fascinante. Les potiers du Nord-Ouest de l’île de Kyūshū ont su conjuguer l’excellence de leur art, une adaptabilité aux marchés locaux et internationaux, ainsi qu’une quête constante d’innovation et de perfectionnement.
La région de Hizen tient une place notoire dans l’histoire de la céramique japonaise puisqu’elle est considérée comme le berceau de la porcelaine nippone. Haut lieu de traditions, ses techniques et savoir-faire sont perpétués de génération en génération. De nos jours, elle figure toujours comme un centre dynamique de la production contemporaine.
Les années 1610, en quoi se caractérisent les prémices de cette nouvelle création ?
Il y a 400 ans, au début de l’époque Edo (1603-1868), la région de Hizen comprenait les actuelles préfectures de Saga et de Nagasaki, regroupant 8 villes clés : Karatsu, Imari, Takeo, Ureshino, Arita, Sasebo (ou Mikawachi), Hirado et Hasami. Cette situation géographique en faisait un premier lieu de contact avec le continent.(1)
A ses débuts, la production céramique d’Hizen se positionne à l’embouchure de diverses influences. En effet, le marché intérieur japonais de porcelaine se composait majoritairement de productions chinoises importées des fours de Jingdezhen.(2)
Les premières créations nippones avaient, alors, pour but de compléter cette offre. Elles restaient donc modestes (10% de la marchandise) et se devaient de s’aligner sur le modèle chinois en termes de motifs et de techniques.(3)
La seconde influence significative fut celle de la Corée. En effet, cette nouvelle création japonaise bénéficia du savoir-faire des potiers coréens, installés de force au Japon suite à l’invasion du pays par Hideyoshi TOYOTOMI en 1590. Ces artisans étrangers ont apporté au Japon de nombreuses techniques ou matériels nouveaux : comme le Noborigama — four grippant qui permet un meilleur contrôle de la température. Ce four fut premièrement importé dans la région de Karatsu sur l’île de Kyūshū. Cette nouvelle innovation revivifia la céramique locale. L’arrivée de ces fours contribua significativement à l’émergence de la porcelaine nippone, au début du 17ème siècle.(4)
(1) Japan Heritage: Hizen Pottery Region, « Model itinerary », Site officiel du Japan Heritage : Hizen Pottery Region, exact URL consulté en mi-novembre 2024.
(2) 佐賀県立九州陶磁文化館 主催、編集 | Saga kenritsu kyūshū tōji bunkakan shusai, henshū, « The Shibasawa collection : 40th anniversary/special commemorative exhibition » : catalogue d’exposition, 16 novembre 2020 – 13 décembre 2020, Musée de la Céramique de Kyūshū, Japon, 2020, p.105.
(3) Saga kenritsu kyūshū tōji bunkakan shusai, henshū, Ibid., p.105-106.
Toutefois, ces céramiques chinoises importées font déjà l’objet d’une adaptation esthétique. En effet, l’aspect de ces marchandises sont choisis selon les goûts de la clientèle japonaise de l’époque afin de répondre aux exigences de la cérémonie du thé. De cela en résulte une apparence plus rustique et simple. WILLMANN Anna, « Edo-Period Japanese Porcelain », Heilbrunn Timeline of Art History, avril 2011, New York, The Metropolitan Museum of Art, 2000–,Exact URL
(4)WILLMANN Anna, « Edo-Period Japanese Porcelain », Heilbrunn Timeline of Art History, Ibid.
Pot en grès à décor peint en fer brun sous glaçure (Karatsu-yaki), 11,4cm-15, 2 cm. Période de Momoyama (1573–1615), Japon ; United-States, New-York, MET Museum, Dr. and Mrs. Roger G. Gerry Collection (Accession Number: 2002.447.21). Exact URL.
Les années 1630-1660, quelle évolution pour la porcelaine de Hizen au sein du marché domestique nippon ?
Les années 1630 marquent un tournant décisif dans l’essor de la première porcelaine japonaise, de part la consolidation de l’approvisionnement en Kaolin. Dès 1616, la carrière d’Izumiyama (région d’Arita) permet un approvisionnement abondant en matière première. (British Museum, « Kakiemon : a history of making Japanese porcelaine », vidéo publiée sur Youtube le 24 juin 2016, exact URL consulté le 2 décembre 2024) Le Kaolin n’est autre qu’un type particulier d’argile qui contient une variété douce et blanche de terre (WILLMANN Anna, « Edo-Period Japanese Porcelain », Heilbrunn Timeline of Art History, op. cit.) indispensable à la production de porcelaine.
De plus, le meilleur contrôle du feu des fours grâce aux techniques des potiers coréens permet de répondre aux difficultés techniques qu’impose ce type de création.
La porcelaine de Hizen se distancie progressivement de ses modèles et influences continentales pour favoriser l’établissement d’un style qui lui est propre. Ces poteries sont de formes et d’utilisations diverses : assiettes pour banquets, bols pour les repas quotidiens etc. Elles revêtent des motifs issus du folklore et de la culture japonaise : paysages de différentes saisons, cerisiers en fleurs, animaux symboliques etc. Ces décors sont peints en bleu de cobalt sur un fond blanc de manière fluide. Ces céramiques d’art sont de plus en plus fines et complexes, recouvertes d’une glaçure transparente, et de texture plus graineuse.(Saga kenritsu kyūshū tōji bunkakan shusai, henshū], op.cit., p.106-107)