Véronique MAURY
(1959-)
Originaire du sud de la France, Perpignan et Avignon par ses 2 parents et installée dans le Vaucluse depuis 25 ans.
« Un atelier perdu entre terre et ciel. La terre, l’eau, l’air et le feu. Les 5 sens en éveil par amour du thé. Ma vie… »
Une amie l’a définie un jour comme une Thé-ramiste : céramiste du thé. Pour elle le Potier fait des pots, et elle ne fait pas que ça. Artiste lui paraît, peut-être à tort, un peu prétentieux. Artisan plutôt vague (maçon, boulanger…). Le Céramiste réunit tout ça.
« J’ai découvert la céramique dans les musées quand j’étais enfant. Avec le souvenir d’en avoir fait un peu au collège, mais surtout plus tard après le bac pendant mes études.
Cela faisait partie du cursus d’études que j’avais choisi, à savoir l’enseignement des Travaux Manuels que j’ai enseigné quelques années, avant sa dramatique disparition au « profit » de la Technologie.
Pendant mes 4 ans d’études, qui comportaient un module de Céramique, j’ai fait des stages d’été, le tout premier de 3 semaines à Ratilly chez Norbert PIERLOT.
Ensuite j’ai enseigné 20 ans, en partie à temps partiel pour me libérer du temps pour la céramique. C’est à cette période que j’ai découvert la pratique du Raku chez une amie céramiste où je prenais des cours, et en stage avec Camille VIROT. En 2003 j’ai arrêté l’enseignement, je me détruisais à enseigner la Technologie, une matière qui ne me correspondait pas du tout. »
« J’ai alors installé mon atelier chez moi et conçu ma production de raku. J’ai commencé à faire des marchés potiers, tout en continuant à me former auprès de Camille VIROT, Nani CHAMPY-SCHOTT et David ROBERTS.
En 2009, je me suis sentie enfermée dans cette production, avec le désir d’en changer, mais sans le bagage technique pour y arriver. Je suis donc partie 6 mois dans un centre de formation à Paris : Atelier Chemins de la Céramique, dirigé à l’époque par Thierry FOUQUET. C’était pour tout y (ré)apprendre, tournage, coulage, terres, émaux, histoire de l’art, etc.
En 2013, je passe une semaine à l’Ecole du Thé, du Palais des Thés. Suite à cela je prépare et donne quelques conférences sur le thème : Céramique et Thé. Je continue à me former régulièrement, stages (Rizu TAKAHASHI, Yoh TANIMOTO 谷本洋), tournage de grosses pièces avec Jean-Jacques DUBERNARD, construction de four à bois avec François FRESNAIS, cuisson anagama chez Michel COHEN, les Rencontres du Printemps des Potiers à Bandol. »
« J’ai aussi beaucoup lu, beaucoup vu d’ateliers et d’expositions de céramique, en France et partout dans le monde où j’ai voyagé, et appris pendant un an la calligraphie chinoise. Tout cela a fait partie de ma formation. L’Univers du Thé est mon domaine de prédilection, donc forcément d’inspiration asiatique.
J’utilise des terres à grès très chamottées, pour leur force et leur présence sous cette peau que sont les engobes et l’émail qui les recouvrent. Je recherche en permanence une cohérence entre la terre, la forme et le décor, le tout dans la sobriété, pour que les 5 sens soient en éveil devant chaque pièce.
Pour certaines commandes (assiettes pour restaurants ou particuliers) il m’arrive aussi d’utiliser un grès lisse de St Amand, sans grand intérêt en temps que tel mais idéal pour un travail de superposition d’émaux.
Mon inspiration vient d’un caillou, un paysage, une peinture, une recette de cuisine, un motif de tissu, une lecture, une architecture, le Japon, les lieux où j’ai voyagé, Haïti et l’Afrique où j’ai vécu, les autres céramistes, mais surtout la céramique japonaise. »
« J’ai 2 fours électriques (150 et 165 litres) et un four à bois récemment construit qui n’a servi qu’une seule fois pour l’instant. Là où j’habite il m’est difficile d’avoir une cuve de gaz, d’où mes fours électriques.
Mes cuissons durent 7 heures pour le biscuit (980°C), et 8 heures pour la cuisson d’émail (grès, 1280°C).
A chaque ouverture de four, je suis rassurée quand tout s’est bien déroulé, si je vois que je n’ai pas fait d’erreur. Tous les potiers sont impatients d’ouvrir leur four. Les échecs ne me découragent pas, ils me donnent l’envie de recommencer.
L’envie du four à bois est venue après, par goût du feu, dans le but de produire des pièces sur lesquelles le passage de la flamme laisse son empreinte, et pour pouvoir utiliser le phénomène de réduction sur le rendu des émaux.
J’ai conçu mon four à bois pour pouvoir mener seule une cuisson sur une journée. Le pin et le chêne vert sont disponibles sur place et sont complémentaires. »
« Mon émail principal, celui qui recouvre la plupart de mes pièces, est une adaptation d’un Kudo-Matto japonais, que je pose par-dessus l’engobe et le décor. C’est un émail que j’assemble moi-même à base de poudres de roches. En règle générale, pas d’émail tout prêt, sauf pour quelques essais de superpositions pour une commande spécifique.
Bien qu’étant centrée sur les objets du thé, ma gamme de pièces est assez large, puisqu’ouverte aussi sur les arts de la table et le végétal. Je ne suis aucune mode, juste ce qui me parle comme couleurs, textures et formes. J’ai sans cesse d’autres idées, d’autres envies. Les commandes aussi me portent vers d’autres chemins.
Je prends beaucoup de plaisir à parler de la céramique et du thé avec qui veut mais je ne donne pas de cours particuliers. »
« Ce qui me paraît indispensable dans la transmission c’est partager les connaissances que l’on a, les pistes de recherche et leurs résultats, pour que chacun dans son coin ne recommence pas sans cesse à zéro.
Je suis très attachée à l’idée du collectif, du partage, de l’échange, de la solidarité. Je fais partie depuis longtemps de Terres de Provence, association régionale des céramistes de PACA, faisant partie du Collectif National des Céramistes.
J’ai adoré la confrontation avec le feu pendant toutes les années où j’ai pratiqué le raku, d’où l’envie d’avoir maintenant mon four à bois.
Ma relation à la création est loin de n’être « que du bonheur », elle est compliquée et conflictuelle, pleine de doutes et de questionnements dont il m’est quelques fois difficile de sortir. Heureusement il y a l’œil de l’autre et son regard pour me rassurer et me faire avancer. »
Véronique MAURY en 5 dates importantes :
1978 : Stage et rencontre avec Norbert PIERLOT à Ratilly.
2009 : Formation professionnelle à Chemins de Terres (maintenant Atelier Chemins de la Céramique).
2013 : Formation à l’Ecole du Thé du Palais des Thés.
2018 et 2023 : Voyages au Japon.
2020 : Création de mon compte Instagram pendant le premier confinement qui m’a ouvert d’autres horizons, et donné un nouveau souffle.
« Ce qui n’est pas advenu offre la passion de poursuivre – Jacqueline LERAT »
Source des photos et des textes : Véronique MAURY et Yann san